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Réécrire notre histoire

ou comment La Petite Sirène est devenue noire...

Quand Disney a dévoilé les premières images du motion pictures de « La Petite Sirène » et que je me suis aperçue que celle-ci, au lieu d’être rousse et caucasienne, avait la peau noire, je me suis dit que Disney marchait sur la tête. Ensuite, quelques jours plus tard, j’ai vu dans une émission de télé une petite fille noire applaudissant devant la bande-annonce du film et répétant les yeux brillants de joie « Maman, elle est noire ! », ravie d’avoir à nouveau, après « La Princesse et la Grenouille », une princesse à laquelle elle pouvait s’identifier et je me suis dit, en fait, c’est moi qui marche sur la tête et tout ça a du sens si ça apporte autant de bonheur à des enfants.

C’est quand la fée Clochette est, elle aussi, devenue noire et que la maison d’édition Puffin Books a commencé a réécrire, au nom de l’inclusion, les livres de Roald Dalh dont « Charlie et la Chocolaterie », « Matilda » ou encore « Sacrées Sorcières » en modifiant certains passages des récits les plus célèbres de l’écrivain pour enfants, enlevant des mots comme « gros » ou « nain » ou encore « femme de ménage » voire « père et mère » qui sont remplacés par « parents » que je me suis dit que je n’étais pas juste une vieille dame à la peau blanche qui avait toujours pu s’identifier aux princesses des contes de fée et que quelque chose ne tournait effectivement pas rond dans le royaume des humains.

Je suis tout à fait convaincue qu’il est important que chaque enfant puisse avoir des héros auxquels s’identifier et que chacun d’entre eux, qu’il soit noir, asiatique, indien, blanc ou encore maghrébin, puisse avoir des héros qui lui ressemblent. Je trouverais tout aussi naturel que tous les genres ethniques soient respectés dans les sirènes qui vivent sur l’île de Peter Pan mais pourquoi « coloriser » artificiellement des archétypes déjà existants plutôt que d’en créer d’autres, contemporains, inclusifs, comme Tiana dans « La Princesse et la Grenouille », Jasmine dans « Aladdin », Mirabelle dans « Encanto » ou encore le super-héros Black Panther de « Wakanda Forever », auxquels les filles et garçons de notre époque peuvent s’identifier.

Pour des raisons qui m’échappent, écrasée par une culpabilité qui ne lui appartient pas vraiment, notre société toute entière, portée par certains de ses représentants, surcompense ses « pêchés » du passé – sans trop se préoccuper de ceux du présent ! – et tente de faire amende honorable auprès des communautés que leurs ancêtres ont offensées, principalement noires quand il s’agit des américains car, en dehors de Mulan, Disney ne semble pas vouloir remodeler le visage de ses héroïnes avec des yeux en amandes ou les pommettes hautes d’une amérindienne ou encore proposer à la communauté homosexuelle un Iron Man gay, par exemple.

Mais, si nous réécrivons notre histoire, comment pourrons-nous transmettre notre expérience aux générations futures ? Comment pourrons-nous leur expliquer nos erreurs collectives, ce qu’elles nous ont enseignées et comment elles nous ont permis d’évoluer vers une société plus juste et plus égalitaire – bon, nous avons encore une bonne marge de progression en la matière – ? Si nous gommons nos imperfections passées, si nous effaçons les œuvres d’art qui témoignent de notre chemin – et de quel droit touchons-nous à l’expression propre à un artiste représentatif de son temps en dénaturant de ce qu’il a cherché à exprimer ? – sous prétexte que notre vision du monde a évolué, que restera-t-il comme trace de notre existence ? Sommes-nous si honteux de qui nous sommes ? Si oui, ne pouvons-nous pas évoluer vers mieux plutôt que de mentir sur qui nous fûmes ?

J’ai une mauvaise nouvelle pour nous en tant que civilisation : ce n’est pas parce que nous effacerons le mot « nègre » des livres écrits il y a un siècle que certains officiers de police actuels cesseront de tuer des hommes parce qu’ils ont la peau noire. Et ce n’est pas parce que nous remplaceront les termes pères et mères au profit de parents dans nos livres qu’il n’y aura plus d’agressions homophobes dans nos écoles et nos rues.

Plutôt que de vouloir effacer le passé, construisons un avenir dont nous pouvons être fiers. Donnons à nos enfants une société dans laquelle ils pourront évoluer en toute sécurité et devenir des êtres humains incroyables grâce aux héros et aux valeurs que nous leur aurons transmis. Assumons qui nous sommes sans oublier qui nous avons été. Soyons meilleurs et apprenons d’un passé que nous ne pouvons pas changer même si les princesses d’antan deviennent noires et que les mots offensants sont effacés de notre littérature.
Redevenons un peuple orgueilleux plutôt qu’un peuple pleutre et médiocre qui est obligé de faire appel à l’amnésie collective pour continuer à exister. Devenons justes, bienveillants et respectueux en étant fiers du chemin parcouru plutôt que de courber l’échine de honte devant un passé qui ne nous appartient pas.

Chaque jour qui passe montre un peu plus que nous sommes une civilisation décadente qui a lâché les rênes de son destin et abandonne progressivement les valeurs humanistes sur lesquelles elle s’est construite. C’est arrivé tout au long de l’histoire pour maintes civilisations, notamment celles de l’Antiquité, et si nous continuons cette course folle vers notre perte, pareils à des poulets sans tête, nous serons tout simplement appelés à disparaître comme elles, ne laissant comme traces de nous que des œuvres d’art réécrites. C’est triste, non ? Peut-être serait-il temps de redresser la tête et de nous battre, chacun à notre échelle, pour montrer que nous pouvons être plus que ça, mieux que ça, pour les valeurs auxquelles nous croyons sans jamais renoncer. Ayons foi en qui nous sommes en tant qu’êtres humains car nous avons encore tant de merveilleuses choses à proposer au monde et gardons notre regard fixé sur un horizon où tout reste encore et toujours à inventer.

Pour ceux qui préfèrent lire à tête reposée ou qui ont du mal à lire sur fond noir, n’hésitez pas à télécharger le PDF de cet article en cliquant sur le bouton ci-dessous.

 

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